Tendrel est une revue qui a été publiée par l’équipe de Dhagpo, de 1982 à 2002, au rythme 2 à 3 numéros par an.
Il y a vingt ans déjà…
Lors d’un week-end organisé en octobre 1999 avec lama Puntso et anila Tcheuying avec une dizaine de jeunes adultes ayant entre 18 et 25 ans, lama Jigmé Rinpoché est venu parler du dharma et de l’éthique. Voici quelques extraits de cet enseignement toujours d’actualité :
Le sens du dharma est de mieux se comprendre, d’avoir une vision plus claire de soi-même et de découvrir comment utiliser son potentiel. Selon l’enseignement du Bouddha, nous avons en nous un potentiel, une sagesse, c’est-à-dire la nature de Bouddha, la nature de l’esprit, le potentiel d’Eveil. Le dharma nous amène à devenir un meilleur être humain. Pour avoir une vie humaine juste et en accord avec l’enseignement du Bouddha, le plus important, est d’avoir une éthique. Parler d’éthique, c’est parler de la vérité. Quand on dit « être dans la vérité », cela peut être ambigu, voire bizarre et l’on ne voit pas très bien à quoi cela fait référence.
Etre dans l’éthique juste ou être dans une vérité signifie d’une part, développer l’honnêteté et d’autre part, développer une attitude juste. L’honnêteté consiste à avoir une relation sincère entre soi et l’autre, une fois cette honnêteté trouvée, on peut alors l’appliquer dans un deuxième temps et la mettre en oeuvre.
Arrêter de nuire
Avoir une éthique juste, veut dire arrêter de nuire aux autres et à soi-même. Il y a deux façons de nuire : le faire de façon directe, immédiate ou nuire de façon plus indirecte en créant les causes qui auront des effets à un moment ou un autre. Se poser des questions, c’est se demander quelles causes génèrent quels effets. Certaines causes perturbent à la fois les autres et nous-mêmes et d’autres non. Il s’agit de faire des choix. « Quelle attitude chez moi va être nuisible pour moi et l’autre, et quelle attitude chez moi ne va pas l’être ? » , c’est là que se trouvent l’éthique juste et la vérité de la situation.
Il y a peu de gens qui veulent volontairement être nuisibles envers eux-mêmes mais s’ils agissent ainsi, c’est par manque de confiance. Sur la base de l’ éthique, de la vérité, de l’honnêteté, ce qui est important est d’essayer d’être positif avec soi et avec les autres, non seulement arrêter de leur nuire, mais essayer constructif. Cela signifie d’arrêter de tromper les autres. Lorsque nous sommes enfermés dans l’orgueil, la jalousie, l’attachement, dans toutes ces émotions qui nous traversent, alors, nous sommes nuisibles.
Comprendre ce qui est vécu
Il est important de comprendre ce qui nous arrive, ce qui nous traverse, ce qui nous fait agir. On peut ainsi faire face aux situations vécues pour en faire quelque chose. Par contre, si nous ne comprenons ni ce qui nous traverse, ni la situation que nous vivons, nous agissons par habitude, de façon innocente, sans vraiment être conscients de ce qui advient. Nous allons donc agir en fonction des autres, du regard qu’ils portent sur nous, de l’influence qu’ils ont et finalement, l’esprit va être complètement pris par les habitudes mentales, pas nécessairement voulues.
Voir le fonctionnement de notre esprit est essentiel. Si nous regardons en nous-mêmes, nous pouvons voir nos fonctionnements avec précision. A partir de ce regard intérieur, une vision nouvelle va émerger, parce qu’on va comprendre les gens, comprendre ce qui est important pour soi-même, comprendre ce que sont les habitudes mentales négatives. Nous sentons alors ce qui est nuisible et perturbant, nous regardons autour de nous et nous voyons qu’il y a des humains qui vivent de diverses façons et que nous pouvons en prendre certains comme exemples inspirants.
L’enfant est souvent clair, frais, plein d’entrain, plein d’élan. Il a envie d’être positif et de se sentir bien, comme tous les êtres humains. Mais, comme tout un chacun, il est aussi plein de confusion, de limites, d’étroitesse et d’émotions. On se rassure en se disant qu’il en va de même pour tous les êtres humains. Mais en fait, ce n’est pas naturel d’être limité, confus, et émotionnel. Par manque de conscience, de clarté, de lucidité, nous nous limitons.
Il est important de nous questionner et de nous demander ce que nous souhaitons. Nous voulons tous de la fraîcheur, de la créativité, être bien et avoir du succès dans nos projets. Afin d’arriver à ces fins, il est nécessaire de voir quels sont nos défauts, à quels moments nous créons la cause du défaut et quand il y a dysfonctionnement. Il est important de prendre le temps de réfléchir par soi-même à ce qui se passe.
Parfois, on peut être extrêmement violent, agressif, colérique, voire même grossier intérieurement. L’esprit entre dans des états de colère très forts. Quand on en regarde la cause, on peut s’apercevoir qu’elle n’a pas l’impact qu’on croyait au début. Nous nous donnons beaucoup d’importance, ce qui génère de la colère, crée de la souffrance et de la perturbation pour soi et pour les autres.
Si l’on ne se laisse pas piéger par cette colère et cette agressivité, il y a beaucoup moins de souffrance pour soi, on est beaucoup plus heureux, et plus disponible. En observant d’où viennent colère et agressivité, nous allons nous rendre compte qu’il y a un lien étroit avec l’attachement, la jalousie ou l’orgueil. En soi, ces émotions ne sont pas un problème. La difficulté réside dans le fait qu’elles ne sont pas vues.
Nous ne sommes pas conscients de tous ces processus émotionnels qui nous mettent dans un état d’irritation qui va générer de la tristesse, de la critique et une vision négative. Ainsi, quand on va entrer en relation avec les autres, on va être complètement contaminé par cette agressivité, et la relation s’en trouvera faussée.
Prendre conscience
Comprendre le processus des émotions et de nos réactions, clarifier l’esprit, c’est voir que nous sommes dans l’illusion. Cela ne veut pas dire que rien n’existe, l’illusion veut dire que nous sommes pris dans les concepts de l’esprit, dans les idées que nous avons cristallisées, que nous sommes enfermés dans un cadre.
Il est essentiel de voir que lorsqu’on est en colère, la cause n’est pas si primordiale qu’on le croit. Nous avons un esprit qui est fondamentalement clair et qui est foncièrement sincère, si nous regardons en nous-mêmes, nous allons donc comprendre. Il nous faut prendre la peine d’aller voir au dedans de nous-mêmes et comprendre comment cela fonctionne pour nous.
Si nous comprenons comment cela se passe pour nous, nous comprenons comment cela se passe pour les autres. De temps en temps, il est nécessaire d’aller voir en nous-mêmes, plutôt que de rester sans agir. Il nous faut prendre le temps de la réflexion, de l’assise et du regard. Si nous regardons, nous allons nous demander pourquoi nous agissons comme nous le faisons et nous allons pouvoir sortir tous les aspects positifs de la situation et ainsi apprendre.
Nous pouvons faire des choix de vie, aller vers plus de joie et un bien être immédiat est possible. Etre attentif au résultat positif engendré par ce que nous mettons en œuvre est important ; nous pouvons trouver la valeur des choses, non pas en terme de jugement, mais de conséquence. Il nous faut nous demander, en tant que jeune adulte, dans quel type d’attitude nous avons envie d’être.
Nous pouvons, à force d’habitudes, avoir des expériences qui soient constructives pour nous-mêmes et pour les autres. Même si changer n’est pas toujours facile, demandons-nous dans quelle direction nous souhaitons cheminer.